Vous pouvez télécharger le programme du Colloque et les résumés des contributions ici:
Et ici
Merci et à bientôt sur Pau!
Diego.
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Merci et à bientôt sur Pau!
Diego.
Chers tous,
Je reviens vers vous au sujet au sujet du colloque PassFront qui se tiendra à Pau les 22 et 23 mars prochains. Il nous faut dès à présent réserver les chambres d’hôtel et faire établir les ordres de mission. Certain.e.s ont déjà confirmé leur participation, mais d’autres ne savaient pas encore, le plus simple est donc de reprendre à zéro en priant celles et ceux qui m’ont déjà répondu d’excuser l’insistance !
Le musée d’Aquitaine accueille les deux premières journées d’étude du programme de recherche Passages et frontières en Aquitaine : expériences migratoires et lieux de transit du XIXe au XXIe siècle (PassFront), mené conjointement par ITEM (Équipe d’accueil 3002, Université de Pau et des Pays de l’Adour), le Réseau aquitain pour l’histoire et la mémoire de l’immigration (Rahmi) et le musée d’Aquitaine. Dans le cadre d’une collaboration originale entre chercheurs universitaires, institutions muséales et acteurs associatifs, ces journées visent à poser les premiers jalons de l’histoire de quelques-uns des lieux signi catifs par lesquels les migrants (émigrants, exilés, réfugiés, contrebandiers, travailleurs) ont transité en Aquitaine depuis le début
du XIXe siècle.
9 h – Accueil à l’auditorium : Katia Kukawka (directrice adjointe du musée d’Aquitaine), Manuel Dias Vaz (Président du Rahmi), Laurent Dornel (MCF, Université de Pau et des Pays de l’Adour, porteur du programme PassFront)
Introduction générale aux journées d’étude
9 h 45 – Yvan Gastaut (MCF en histoire contemporaine, Université de Nice) Traverser la frontière au XXe siècle : images et récits
10 h 30 – Diego Gaspar (post-doctorant, Université d’Alcalà, Madrid) PassFront : dé nition, visibilité et communication
Grande Guerre, migrations et passages
11 h – Pablo Aguirre (doctorant, Université de Saragosse)
Je m’en vais déserter. Insoumis à travers la frontière des Basses-Pyrénées (1914-1918).
11 h 30 – Emmanuel Filhol (maître de conférences honoraire à l’université de Bordeaux)
Le traitement administratif des étrangers en Gironde pendant la Grande Guerre.
12 h – Discussion 12 h 30 – Déjeuner
La migration et la frontière au féminin
14 h – Mathilde Belaval (étudiante en master 1, Université Toulouse Jean Jaurès) « Elle a trimé ma mère ! » : les femmes migrantes dans le Sud-Ouest
de l’entre-deux-guerres
14 h 30 – José A. Perales Diaz (enseignant-chercheur, Université Publique de Navarre)
Caminos de ida y vuelta en la frontera del Pirineo Occidental : el caso
de las golondrinas navarroaragonesas en Soule.
Liens transfrontaliers
15 h – Javier Mur Royo (doctorant, Université de Saragosse/ Université
de Pau et des Pays de l’Adour)
Le Béarn et l’Aragon, 90 ans d’histoire associative. Du Comité de relations intellectuelles et sportives Béarn-Aragon à l’Association Béarn Bigorre Aragon Navarre (1927-2017)
15 h 30 – Discussion
9 h – Manuel Dias Vaz (Président du Rahmi) PassFront : partenariats et lieux de mémoire
La frontière, un espace politique
9 h 30 – Delphine Diaz (MCF en histoire contemporaine, Université de Reims)
Le passage de la frontière pyrénéenne par les exilés espagnols au cours du premier XIXe siècle
10 h – Alexandre Dupont (Docteur, ATER, Université Aix-Marseille)
Du réseau au territoire. L’acheminement des combattants pro-carlistes en Espagne (années 1870)
10 h 30 – Pause
10 h 45 – Roberto Ceamanos (enseignant-chercheur, Université de Saragosse)
Les « autres » exilés : monarchistes, ecclésiastiques et réfugiés d ́Octobre pendant la Deuxième République (1931-1936)
Lieux de transit
11 h 30 – Victor Pereira (MCF en histoire contemporaine, Université de Pau et des Pays de l’Adour)
Le dépôt d’Hendaye, porte d’entrée des Portugais en Aquitaine
12 h – Discussion 12 h 30 – Déjeuner
14 h 15 – Chabier Gimeno (chercheur en sociologie et travailleur social, Université de Saragosse)
Centres d’accueil pour mineurs qui migrent seuls : lieux de transit et contrôle en Aragón et Aquitaine
14 h 45 – Adèle Sutre (docteure en géographie, EHESS, agrégée dans le secondaire)
Passages tsiganes en Aquitaine (1880-1950)
15 h 15 – Leila Sadel (photographe)
« Lieux et objets refuge dans l’expérience migratoire : un regard photographique »
15 h 45 – Discussions, conclusions (Yvan Gastaut et Laurent Dornel)
Renseignements Pratiques
Musée d’Aquitaine
20 cours Pasteur
33000 Bordeaux
Tramway : ligne B, arrêt musée d’Aquitaine Tél. : 05 56 01 51 00 http://www.musee-aquitaine-bordeaux.fr
(PDF) Programme des Journées
Chers tous
Ce projet, centré sur l’espace aquitain, mobilisera des chercheurs aquitains, mais également des chercheurs étrangers, espagnols surtout, spécialistes des migrations. Il pourra compter sur une petite équipe d’historiens espagnols ayant déjà travaillé ensemble dans le cadre de projets antérieurs. Outre José Antonio Perales pour l’Université de Navarre, sont engagés dans le projet des chercheurs de l’université de Saragosse :
Roberto Ceamanos Llorens, Diego Gaspar Celaya, Chabier Gimeno Monterde (sociologue), ainsi que deux doctorants de R.Ceamanos : Pablo Aguirre Herrainz et Javier Mur Royo, ce dernier venant d’entreprendre son doctorat sur les relations culturelles transpyrénéennes Aragon-France au XXe siècle.
Du côté français, mentionnons les chercheurs aquitains : pour Pau (ITEM) se sont engagés Laurent Dornel (MCF, porteur du projet), Victor Pereira (MCF), Laurent Jalabert (PR), ainsi que José Cubero (professeur agrégé). Pour Bordeaux (CEMMC), Alexandre Fernandez (PR histoire contemporaine) a accepté d’apporter son expertise et participera donc au projet.
Cette première équipe sera également renforcée par des chercheurs français ayant acquis sur les questions abordées une précieuse expertise: Marc Bernardot (PR de sociologie, Le Havre), Delphine Diaz (MCF histoire contemporaine, Université de Reims), Alexandre Dupont (docteur en histoire, ATER, université de Marseille), Emmanuel Filhol (MCF honoraire, Bordeaux), Alexandra Clavé-Mercier (docteure en anthropologie sociale, LAM Bordeaux) et Adèle Sutre (doctorante au Centre de Recherche en Histoire à l’EHESS, travaille sur les circulations de familles tsiganes entre 1850 et 1950 sous la direction de Marie-Vic Ozouf-Marignier).
D’une part, une large collecte documentaire nécessaire à un premier état des lieux sera lancée dans les archives départementales (Pyrénées-Atlantiques, Landes, Gironde, Lot-et- Garonne, Dordogne) et dans les fonds nationaux intéressant notre sujet (Archives nationales avec les sous-séries F7 ou BB18 par exemple ; Archives diplomatiques de La Courneuve et de Nantes). D’autre part, sous la direction plus particulière du Rahmi, sera établie une bibliographie exhaustive relative aux principaux axes thématiques présentés dans le projet et réalisée avec le logiciel Zotero (possibilité d’une bibliographie collaborative et accessible en ligne à tous les publics). Une cartographie des lieux de transit sera entreprise, qui proposera notamment un récapitulatif des lieux d’internement des étrangers au XXe siècle. Enfin, sera effectué un repérage des différentes associations travaillant sur la mémoire des lieux de passage et plus particulièrement des lieux d’internement.
Par ailleurs, deux journées d’études (automne 2016 et automne 2017) seront organisées, avec lancement d’appel à communication et sollicitation des chercheurs français et étrangers avec lesquels des liens sont déjà établis. La première journée d’étude sera en partie consacrée à un bilan des différentes initiatives engagées sur la thématique des frontières évoquées plus haut ; elle sera également l’occasion de réunir les différentes associations travaillant notamment à la réhabilitation mémorielle des lieux de passage et des camps en particulier. La seconde permettra de mieux faire connaître les expériences migratoires et les lieux de transit évoqués dans la présentation scientifique de notre projet. Les deux journées feront l’objet d’une publication terminale.
Enfin, des expositions seront organisées par les institutions partenaires : il pourra s’agir tant d’initiatives des archives départementales (valorisation des fonds relatifs aux thématiques centrales du projet) que de prêt d’expositions déjà réalisées. Le Musée d’Aquitaine a ainsi déjà acté le prêt de l’exposition Sala de Espera, composée à partir des travaux du photographe Gabriel Martinez sur les immigrants portugais en gare d’Hendaye. Par ailleurs, est prévue la réalisation d’une exposition originale mêlant documents historiques sur les lieux de transit et création contemporaine : sélectionné par le musée d’Aquitaine, un artiste (photographe) aura pourra mission de proposer, à côté des photographies originales d’époque sélectionnées en différents lieux (Bibliothèque de Documentation Internationale Contemporaine, ECPAD, Médiathèque de l’Architecture et du Patrimoine) un travail de création original. Une des pistes possibles serait une création sur les lieux de regroupement liés aux conflits militaires (1914-1918, 1939-1945, conflits de décolonisation des années 1950-1960).
L’ampleur du projet, la diversité des acteurs mobilisés – et à mobiliser – supposent un travail au long cours (2016-2019). La demande formulée auprès de la région Aquitaine, qui s’appuie largement sur le projet scientifique du laboratoire ITEM, permettra de renforcer un processus de recherche déjà entamé (Recurut, « Migrations modernes et contemporaines entre l’Aragon et l’Aquitaine (XVII-XVIII siècles) : l’exil ibérique en Aquitaine entre histoire et mémoire »).
Dans ce cadre, l’objectif est de coordonner une équipe de chercheurs aquitains (ITEM à Pau et CEMMC à Bordeaux), tout en associant un certain nombre d’enseignants-chercheurs d’autres universités françaises et étrangères (espagnoles plus particulièrement) avec lesquels des liens sont solidement établis.
Sous la coordination du porteur du projet (Laurent Dornel), les chercheurs travailleront également en association d’une part, avec le Musée d’Aquitaine (co-financeur) qui a développé depuis des années une activité liée aux communautés étrangères en Aquitaine et, d’autre part, avec le Rahmi6 (co-financeur) dont l’expertise dans le champ des migrations est reconnue. Plusieurs Archives départementales (Gironde, Lot-et-Garonne, Pyrénées- Atlantiques), quoique ne pouvant participer au financement du projet, sont susceptibles de s’y associer avec un très grand intérêt dans le cadre, notamment, de la valorisation de leurs fonds. Agnès Vatican, sollicitée par les représentants du musée d’Aquitaine et du Rahmi, a ainsi manifesté son plus vif intérêt pour le projet.
Enfin, une politique de diffusion et de valorisation de la recherche sera mise en œuvre auprès du grand public au moyen d’expositions itinérantes (qui pourront par exemple être accueillies par les archives départementales) et de conférences (notamment par le biais de Lacq Odyssée, association avec laquelle les liens existent déjà7). Le musée d’Aquitaine proposera à partir de la rentrée 2016 un cycle de conférences sur le thème « Migrations, Passages, Frontières ». La conférence inaugurale devrait être prononcée par Yvan Gastaut, maître de conférences en histoire contemporaine à l’Université de Nice, commissaire de l’exposition Frontières présentée au Musée National de l’Histoire de l’Immigration (novembre 2015-mai 2016).
Rappelons enfin que le Rahmi dispose avec des associations comme l’ALIFS (Association du Lien Interculturel Familial et Social) ou MC2A (Migrations Culturelles Aquitaine Afriques) d’acteurs reconnus pour leur capacité à toucher un vaste public.
[…]
Le projet présenté par l’UPPA, avec le soutien financier du Musée d’Aquitaine et du Rahmi est ainsi articulé avec un ensemble d’initiatives au niveau national.
Comme nous l’avons signalé plus haut, les aspects que nous nous proposons d’étudier n’ont été que très partiellement abordés par les historiens. S’il peut exister, ici et là, des études d’érudits locaux, en revanche, il n’existe pas de publication récente d’ensemble. La série Série L’Aquitaine, terre d’immigration (Publication de la MSHA) date des années 1980. Il existe donc un réel besoin de recherche historique, justifié par l’existence de fonds parfois importants dans les archives départementales. Afin d’éviter le piège du « localisme », nous nous proposons de mettre en perspective les études sur le terrain aquitain grâce à l’apport des compétences de collègues historiens et sociologues travaillant sur d’autres espaces. À ce titre, l’apport des chercheurs espagnols sera décisif.
En France, l’histoire des migrations, largement dominée par la question de l’« intégration » [Horowitz et Noiriel 1992], focalisée pour l’essentiel sur l’installation ou la fixation des migrants, a quelque peu délaissé d’une part, d’autres formes d’expériences migratoires, plus temporaires, moins linéaires ; d’autre part, les lieux par lesquels ont transité les grands flux migratoires. Notre projet de recherche, qui porte sur l’Aquitaine (une terre de passages traversée par des migrations aussi anciennes que diverses2), s’ordonne donc autour de ces deux points : expériences migratoires (1) et lieux de transit (2).
1) À côté des grands flux aboutissant à la sédentarisation, à l’installation quasi définitive de migrants dans un espace donné, on observe des mouvements plus provisoires, numériquement moindres. Il peut s’agir des « migrants transitaires » [Parant 1999], le transit pouvant être défini comme le passage par un territoire en direction d’un autre territoire [Aprile et Dufoix 2009]. Ils sont constitués de groupes variés : exilés, réfugiés, déplacés, voire travailleurs saisonniers ou temporaires. Les problèmes et les enjeux soulevés par la présence de ces groupes de migrants ne recoupent pas nécessairement ceux que posent les grands flux migratoires classiquement appréhendés par le prisme de problématiques comme l’« intégration », voire – curieux retour du vocabulaire colonial – l’« assimilation ». Autrement dit, l’analyse ne porte plus sur la relation classique entre migration et insertion mais sur celle, moins travaillée, entre migration et territoire [Tarrius 1992]. Des recherches récentes ont ainsi, par exemple, concerné les « territoires de l’attente » [Vidal et Musset 2015]. Par ailleurs, dans bien des cas, l’expérience du transit – qui peut ressembler à celle du voyage – constitue une expérience existentielle importante encore insuffisamment prise en compte par les historiens [Green 1999]. C’est aussi dans ce premier cadre problématique que l’on peut s’intéresser à des thématiques comme le contrôle des migrants en transit, la mémoire des migrations ou encore le rôle des passeurs, thématiques dont on comprend qu’elles entrent en résonnance avec les difficultés qu’engendre la poussée migratoire que connaît l’Europe aujourd’hui.
2) Le second point concerne les lieux de transit, qu’ils intéressent les grands flux migratoires ou les migrations transitaires. Ces lieux présentent une réelle diversité à la fois morphologique et fonctionnelle : chemins, routes, gares, ports, aéroports, postes frontières sont des passages plus ou moins obligés des migrants et participent, à l’image d’Ellis Island, aux représentations liées aux migrations. Par ailleurs, dans le cas des migrations temporaires ou transitaires (comme celles des réfugiés ou des « rapatriés »), se dessine une topographie spécifique : logements de fortune (hôtels, garnis), dépôts (pour les réfugiés dès la monarchie de Juillet, pour les travailleurs coloniaux pendant la Première Guerre mondiale, etc.), camps (de transit, de regroupement, de travail, etc.) ou même bidonvilles, dont on se demandera s’ils ne sont pas aussi des hétérotopies (lieux/espaces échappant à la socialité dominante) et, in fine des exemples typiques d’un provisoire qui peut durer [Agier 2002, 2013 ; Bernardot 2008].
Au-delà de ces deux axes problématiques, émerge la thématique d’une économie générale du transit pouvant susciter des croisements disciplinaires (histoire, géographie, mais aussi sociologie, littérature, etc.). Mais ce projet de recherche soulève aussi les questions de la mémoire, celle de la patrimonialisation des lieux de passage et enfin celle de la gestion de ces espaces par les acteurs des territoires (l’État, ses représentants – comme les préfectures, les douanes, les services sociaux – les collectivités territoriales, les secteurs associatifs, etc.).
En résumé, notre projet se propose d’étudier, pour l’espace aquitain, sur la longue durée mais en nous appuyant sur quelques moments spécifiques, les expériences migratoires et les lieux de transit dans leur double dimension historique et patrimoniale. Ce projet s’inscrit dans les axes thématiques du laboratoire ITEM et dans la continuité de recherches entamées depuis quelques années3.
C) Les enjeux pour l’histoire des migrations en Aquitaine
L’espace aquitain, qui n’est pas habituellement considéré comme une grande région d’immigration à l’instar de la région parisienne, du Nord ou du Midi méditerranéen, peut constituer un « terrain » tout à la fois pertinent et original pour l’analyse de ces enjeux historiques. Une première esquisse chronologique permet de souligner des rythmes et des tendances à la fois partagées avec les autres régions traditionnelles d’immigration et spécifiques à l’Aquitaine ou plus largement à un vaste Sud-Ouest allant grosso modo de Bordeaux au littoral languedocien.
Au cours de la période contemporaine, l’Aquitaine, terre d’immigration et d’émigration, a connu de nombreux épisodes migratoires liés à des conflits militaires ou politiques d’une part, et, d’autre part, aux trois grandes périodes d’appel à la main-d’œuvre étrangère (années 1880-1900 ; années 1920 ; « Trente Glorieuses »).
Les guerres napoléoniennes ont provoqué ainsi l’afflux de prisonniers de guerre mais aussi de réfugiés espagnols, comme en témoignent les Archives Départementales de Gironde et du Lot-et-Garonne. La défaite de Napoléon provoque ensuite l’invasion de la France – les deux tiers des départements sont occupés – mais l’Aquitaine, où se déroulent quelques combats (bataille d’Orthez gagnée par Wellington), est épargnée par l’occupation. Par la suite, la monarchie de Juillet est marquée par un afflux important de réfugiés politiques [Noiriel 1991, Diaz 2014] fuyant les répressions des mouvements libéraux et nationaux. L’Aquitaine reçoit alors des Polonais, des Espagnols (carlistes) ou encore des Italiens (carbonari) pour lesquels les monographies demeurent fort rares. Ainsi, malgré les recherches de Cécile Mondonico [1995] ou celles, plus récentes d’Emmanuel Tronco [2010] et surtout de Delphine Diaz [2014], la connaissance des dépôts de réfugiés en Aquitaine mérite d’être approfondie.
Tout au long du XIXe siècle, l’espace aquitain est par ailleurs un lieu de transit, une « porte des Outre-mers » (Blanchard 2006), que continuent bien sûr à traverser de très anciennes migrations spirituelles (chemins vers Saint-Jacques-de-Compostelle). La Belle Époque correspond aux maxima de l’émigration, notamment basco-béarnaise, vers les Amériques (États-Unis, Mexique, Argentine) mais on s’arrêtera plus volontiers sur la période 1914-1920.
En effet, pour la France, la Première Guerre mondiale constitue, en matière migratoire, un tournant majeur auquel l’Aquitaine n’échappe pas. Elle se caractérise notamment par :
belges, leur nombre pour la France dépassant 325 000 à la fin du conflit [Amara,
2008].
1995] : sont recrutés dans l’empire colonial environ 600 000 soldats (dont 450 000 combattent en Europe) ainsi que 220 000 travailleurs, auxquels il faut ajouter 37 000 ouvriers chinois.
Quelle place l’Aquitaine, dont le territoire échappe largement aux combats et aux destructions, tient-elle dans ces flux migratoires ? De façon générale, l’Aquitaine (17e Région militaire), bien qu’éloignée du conflit, en est partie prenante comme «espace intermédiaire » et comme espace de « récupération » (soins pour les blessés, « hivernage » pour les troupes coloniales). Il n’existe à ce jour aucune étude historique sur la présence multiforme de ces milliers d’étrangers qui affluent en Aquitaine pendant la Grande Guerre ni, par conséquent, sur les lieux de transit et de passages, alors que les cinq départements accueillent des travailleurs indochinois et des tirailleurs sénégalais à Pau, des troupes russes démobilisées au camp du Courneau, des travailleurs espagnols et coloniaux sur les ports et docks bordelais ou dans les poudreries alentour (Saint-Médard, Bassens), ainsi que près de 10 000 « sapeurs bûcherons » américains.
L’un des objectifs concrets du projet serait dès lors de dresser la cartographie des principaux lieux où les étrangers se concentrèrent pendant la guerre. Une telle entreprise impliquerait de distinguer notamment :
Périgueux, hôpital d’Hendaye pour les Portugais, stations thermales comme Eux- Bonnes où sont présents des soldats américains ou encore centres de convalescence)
– Les zones de concentration des réfugiés
Pendant l’entre-deux-guerres, l’Aquitaine devient terre d’immigration (jusqu’à 6% de la population régionale). Entre 1911 et 1936, la région gagne 26 000 étrangers. C’est une immigration essentiellement italienne (+30 000), concentrée plus particulièrement en vallée de Garonne. Mais le nombre des Espagnols croît également (+20 000), surtout dans les centres urbains (Bordeaux, Pau, Bayonne), sans oublier plusieurs milliers de réfugiés politiques ou religieux (Juifs d’URSS ou d’Europe centrale, Arméniens). Toutefois, cet accueil ne sera souvent que provisoire, certains immigrants se réorientant vers d’autres régions de France ou d’autres pays à partir des ports internationaux (en 1936, en Gironde, on comptait quatre fois moins de Marocains qu’en 1927), d’autres étant chassés ou déportés quelques années plus tard. L’Aquitaine apparaît ainsi une fois encore comme un vaste espace transitaire polarisé.
Sans revenir en détail ni sur la période de la guerre civile espagnole ni sur celle de la Seconde Guerre mondiale pour lesquelles nous disposons d’un certain nombre d’études [Jalabert 2014], notre projet se propose néanmoins de les inclure dans une étude de moyenne durée des lieux d’internement et de regroupement en Aquitaine. En effet, un certain nombre4 de camps d’internement (pour les étrangers et les nomades) de la Seconde Guerre sont situés sur les lieux des camps de la Première Guerre (Bazas, Bassens, Cazaux, Saint-Médard-en-Jalles, Mérignac, Mimizan). Les cantonnements de la poudrerie de Bergerac5 qui avaient notamment regroupé des centaines de travailleurs indochinois pendant la Première Guerre en reçoivent à nouveau pendant la Seconde. Une partie de ces derniers est déplacée vers d’autres camps en Lot-et-Garonne (Bias, Sainte-Livrade) tandis que près de 1600 Espagnols travaillant à la construction de la poudrerie de Sainte-Livrade sont regroupés dans un camp à Casseneuil [Cohen & Malo 1994]. Il existe donc des formes de continuité dans cette topographie particulière des lieux de passage. Mais des pans entiers de cette histoire de l’internement restent à écrire, pour les Landes par exemple (Labouheyre aurait eu, à sa lisière, un camp où furent cantonnés des Sénégalais, mais on n’en sait guère plus…).
À l’échelle nationale, les années qui suivent la Seconde Guerre mondiale sont caractérisées à la fois par une intensification et une diversification des flux migratoires. L’Aquitaine ne fait pas exception puisqu’elle est largement concernée par l’immigration étrangère (Portugais notamment) et coloniale puis postcoloniale. Pendant les « Trente Glorieuses », la traversée de l’Aquitaine se fait notamment par la RN10, véritable porte d’entrée en France connue parfois aussi comme le « cimetière des Portugais ». À ces migrations – qui voient la naissance et la multiplication des lieux de transit : peu de bidonvilles mais des foyers de migrants – s’ajoutent des flux plus spécifiques qui résultent des guerres de décolonisation (Indochine et Algérie), ce qui relance ainsi l’activité des camps de Sainte-Livrade et de Bias devenus Centre d’accueil des Français d’Indochine pour le premier, et Centre d’Accueil des rapatriés d’Algérie (pour les Harkis) puis Centre de reclassement pour le second.